Queer - Luca Guadagnigno
Au lendemain de ma séance au cinéma à la découverte de Queer dirigé par Luca Guadagnino, mes émotions ont décanté. J’étais très agréablement troublée hier et je pense que les grands films ont cet effet là sur les spectateurs. Lors du générique de fin, un homme s’était même exclamé “What the f*ck did I watch?”. Queer donne à voir une période de la vie de Lee, interprété par Daniel Craig, au Mexico vers les années 50. Lee aime les hommes et s’éprend d’un jeune homme, Eugene, qui, a priori, aime les femmes.
Le thème de l’inconscient est très présent et c’est en cela que certaines scènes absurdes peuvent troubler. J’ai apprécié cette fenêtre originale et différente qui laisse voir les tumultes de Lee. Donner une grande place à l’inconscient est aussi un message, selon moi. Nos orientations sexuelles se cachent parfois, enfouies et certaines rencontres peuvent tracer un chemin plus limpide.
L'esthétique du film est teintée d’une lumière sablée qui se reflète dans un Mexico city à la belle palette ocre. Eugene est longiligne, très élégant, au sourire discret. Cet idéal masculin m’a tout fait rappelé les personnages de Call Me By Your Name, dirigé par Guadagnino quelques années auparavant. C’est d’une surprise enjouée que j’ai fait la rencontre d’un James Bond solaire, souriant, vulnérable, timide parfois. Quel courageux saut en avant que d’avoir choisi une telle figure de la masculinité, comme on se la représente, et de la faire évoluer dans un contexte tout à fait différent. Il y a inévitablement des scènes de sexe masculins, auxquelles on s’attend, qui viendront chambouler nos schémas pré-construits. Les scènes prennent le temps afin que le spectateur trouve doucement son rythme dans ce nouvel imaginaire qu’il est donné à voir, de surpasser l’inconfort initial et d’enfin apprécier cet autre côté du prisme. Les grands films changent les façons de penser de sa société et Guadagnino a osé redessiner le James Bond taciturne en un homme d’aujourd’hui.